Les dépréciations monétaires risquent d’aggraver la crise alimentaire et énergétique mondiale (Banque mondiale)

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Les dépréciations monétaires risquent d’exacerber les crises alimentaires et énergétiques auxquelles plusieurs pays sont déjà confrontés.

Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, les prix élevés des produits de base pourraient prolonger les pressions inflationnistes. Cela contribuerait à aggraver la crise alimentaire et énergétique à travers le monde. L’Afrique, l’un des continents avec le plus grand nombre d’économies émergentes, n’y échappera pas.

La dépréciation de la monnaie de la plupart des économies en développement entraîne une hausse importante des prix des denrées et des carburants. Celle-ci aura pour conséquence d’empirer les crises alimentaires et énergétiques auxquelles plusieurs de ces pays sont déjà confrontés. L’alerte a été lancée par la Banque mondiale dans la dernière édition de son rapport Commodity Markets Outlook.

Une hausse importante des prix

Selon le rapport de la Banque mondiale, les prix en dollars de la plupart des produits de base ont baissé par rapport aux sommets atteints récemment. Entre le début de la crise russo-ukrainienne en février et la fin du mois dernier, le cours du pétrole brut en dollars a chuté de près de 6 %. Toutefois, en raison des dépréciations monétaires, près de 60 % des économies en développement importatrices de pétrole ont enregistré une hausse des prix en monnaie nationale, au cours de cette période. Près de 90 % de ces économies ont également connu une augmentation des prix du blé plus importante en monnaie locale que celle observée en dollars.

Les prix élevés des matières premières énergétiques utilisées comme intrants agricoles affectent également les prix des denrées alimentaires. En Afrique du Nord et subsaharienne, la hausse s’est située entre 12 et 15 %. « Même si le prix de nombreux produits de base a reculé par rapport à son pic, il reste élevé par rapport à son niveau moyen des cinq dernières années », a indiqué Pablo Saavedra, vice-président de la Banque mondiale pour la division Croissance équitable, finances et institutions. Selon lui, une nouvelle envolée des cours mondiaux des denrées pourrait prolonger les problèmes d’insécurité alimentaire dans les pays en développement.

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Plusieurs économies africaines affectées par l’inflation

En Afrique, plusieurs monnaies nationales semblent souffrir sévèrement des affres de l’inflation. À titre d’exemple, la monnaie ghanéenne, le cédi, a perdu 47 % de sa valeur face au dollar depuis le mois de janvier. Elle est devenue, d’après Bloomberg, la monnaie la plus faible du monde. Les commerçants du pays ont récemment lancé une grève pour protester contre l’inflation galopante.

Selon Jeune Afrique, la plupart des monnaies du continent connaissent un sort similaire.  La dépréciation du naira, la monnaie nigériane, pourrait s’intensifier. Et pour cause, elle détient un taux de change supérieur à sa juste valeur. Elle serait surévaluée à hauteur de 20 %, selon la Bank of America. Le franc CFA, monnaie utilisée par 14 pays d’Afrique subsaharienne, subit également une dépréciation quoique plus lente.  Elle suit les mêmes variations que l’euro vis-à-vis du dollar. Le taux de change de la monnaie est actuellement estimé à 657 F CFA pour un dollar, contre 615 F CFA en 2020.

La situation est également critique dans des pays tels que le Zimbabwe. La monnaie nationale s’échange actuellement à 159,34 dollars zimbabwéens pour un dollar américain. Elle a perdu plus d’un quart de sa valeur en 2021 et poursuit cette tendance depuis le début de 2022. Cette situation contraint de nombreux Zimbabwéens à abandonner leur monnaie locale au profit des devises étrangères.

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Une augmentation des niveaux de pauvreté dans la région

L’inflation met un frein à la lutte contre la pauvreté en Afrique subsaharienne. La région compte aujourd’hui 60 % de l’ensemble des personnes vivant dans l’extrême pauvreté. À elle seule, elle englobe 389 millions, soit plus que toutes les autres régions. Le taux de pauvreté de la région est d’environ 35 %, le plus élevé du monde. Pour atteindre l’objectif de réduction de la pauvreté à l’horizon 2030, chaque pays de la région devrait enregistrer une croissance du PIB par habitant de 9 % par an pendant le reste de la décennie. C’est un objectif exceptionnellement élevé pour des pays dont la croissance du PIB par habitant était en moyenne de 1,2 % au cours de la décennie précédant la COVID-19.

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