Pour l’Afrique, la mobilisation du financement est l’un des principaux enjeux de l’action climatique. L’annonce par Southbridge, de la création d’un fonds pour mobiliser 2 milliards $ pour l’action climatique a naturellement été très remarquée. Comprendre Media est allé à la rencontre de Lionel Zinsou, l’un des co-créateurs de Southbridge. Il nous révèle les détails et les enjeux de ce fonds, mais également son point de vue sur l’action climatique en Afrique en tant que financier, mais aussi en tant qu’homme d’Etat.
Comprendre Media : L’annonce du fonds climatique de 2 milliards $ pour l’Afrique a été l’un des faits marquants de la COP 27. Pourquoi cette annonce à ce moment précis ?
Lionel Zinsou : Nous avons annoncé à la COP 27, la création d’un fonds d’investissement pour la restauration des paysages et des forêts en Afrique sous la houlette de Southbridge. Le fonds porte le nom swahili de Vumbuzi qui veut dire innovation, sera sous la responsabilité de la Tanzanienne Frannie Leautier qui a occupé, entre autres, les postes de numéro 2 de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement.
A cette COP en terre africaine, il était intéressant de parler de cette initiative certes globale, mais faite par des Africains pour des Africains. Southbridge regroupe une trentaine d’Africains : Béninois, Rwandais, Tanzaniens, etc. expérimentés dans leur domaine. Nous sommes réunis par la volonté de capitaliser nos expériences dans des grands groupes multilatéraux, les grandes entreprises et de les mettre au service de l’Afrique.
Le chiffre des 2 milliards $ à mobiliser pour la finance climatique a frappé les gens. Il faut dire que l’Afrique n’avait pas un fonds dédié de 2 milliards prêt à être déployé à partir de 2023 pour le climat. Mais c’est peu par rapport à 80 000 milliards, la richesse du monde. 2 milliards, c’est moins d’un millième du PIB annuel de l’Afrique qui s’élève à 3 000 milliards $.
L’Afrique doit investir le plus vite possible dans l’action climatique à travers la transition énergétique, l’eau, la foresterie, l’agriculture résiliente, l’utilisation des tourbières, des mangroves, etc. A terme, le continent devra consentir un minimum de 100 milliards $ d’efforts d’investissements sur lui-même.
Nos 2 milliards $ frappent beaucoup de personnes, mais c’est peu de chose. Il va falloir qu’on passe très vite de 3 milliards $ à 100 milliards $ de financements sous toutes formes sur l’ensemble du continent.
Ce qui s’est passé à Sharm El Cheick est que nous sommes arrivés à un tournant où l’Afrique décide de prendre l’initiative et de s’organiser elle-même.
CM : Avez-vous déjà des investisseurs prêts à vous accompagner dans la mobilisation de ces 2 milliards $ ?
LZ : Southbridge s’est associé trois principales parties pour la réalisation de ce fonds. La première est la BADEA (Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique) qui fera des concours concessionnels, donc moins chers. Les pays arabes qui sont les plus grands émetteurs au monde, avec 40 tonnes par habitant, en raison de la production d’hydrocarbures et d’une forte industrie lourde, ont conscience de leur besoin de compensation. Ils perçoivent plus facilement que les pays occidentaux l’opportunité d’investir dans des projets climatiques en Afrique pour obtenir les crédits carbones dont ils auront besoin et participer à la décarbonation du monde.
Nous avons également avec nous la Bezos Earth Fund, créée par le fondateur d’Amazon qui consacre 10 milliards $ de sa fortune à l’accélération de la transition et la compensation des émissions des data center. Il est prévu qu’une partie de ce financement sous forme de don, soit consacrée à l’Afrique.
La troisième partie Think Tank Word Resources Institute (WRI) qui participera au travail de plaidoyer et de collecte des ressources.
Notre ambition est d’utiliser les ressources mises à disposition par ces partenaires comme catalyseur pour trouver des co-investisseurs qui s’intéressent à ces sujets.
Nous n’avons aucun doute dans l’atteinte de notre objectif parce que même si nous sommes une jeune entreprise de 5 ans si vous additionnez l’âge de Donald Kaberuka avec le mien, on est à 138 ans d’âge, dont 90 années d’expérience professionnelle. Nous disposons également d’une équipe exceptionnelle avec des expériences complémentaires de connaissance des institutions de développement tournés vers les Etats, de conseil en fusion-acquisition, plus tourné vers les entreprises, de banque de marché, etc.
CM : Une fois le financement mobilisé à quoi servira-t-il concrètement ?
LZ : Dans un premier temps, nous créerons une fondation pour continuer à faire du plaidoyer les idées africaines et les intérêts de l’Afrique sur les enjeux climatiques. Instruits de l’expérience des autres, nous ne referons pas les mêmes erreurs et nous n’avons pas à recevoir des leçons des autres.
Deuxièmement, nous créerons un fonds concessionnel et un fonds privé. Le fonds concessionnel permettra de baisser le taux d’intérêt des crédits et les attentes de rendement du capital du secteur privé.
Nous combinerons les apports des investisseurs avec les dons et les financements concessionnaires parce que nous sommes dans une logique publique et non dans une pure logique privée de rendement. Le mix de ces ressources nous permettra d’allouer des crédits à un coût inférieur à celui du marché et de minimiser la perception du risque. Nous pourrons ainsi attirer le secteur privé qui bénéficiera de la rémunération normale du capital tout en offrant des bonifications aux bénéficiaires du financement.
CM : Vous venez tantôt d’évoquer la perception des risques qui est assez élevé lorsqu’il s’agit de l’Afrique. Quelle stratégie avez-vous prévu pour la minimiser ?
LZ : Les gens rechignent à investir dans les forêts africaines parce que les premiers retours sur investissements se font après 7 ans au minimum voire 40 ans pour certains arbres. Ils se demandent : « Pourquoi investir en Afrique, avec risques de coup d’état et d’instabilité alors que je pourrais investir au Texas ou dans les Landes ? » Ils craignent qu’un capitaine quelconque qui vienne renverser le régime, mette des taxes, nationalise leur projet etc.
L’Afrique est, statistiquement le continent où il y a le moins de sinistre pour les investissements, mais la plupart des investisseurs pensent le contraire. Comme il est difficile de les convaincre avec juste des arguments, nous leur fournirons des assurances. Grâce à notre mix de dons, de fonds concessionnels et de capitaux à prix réel, nous prendrons en charge le coût de l’assurance.
L’épargne du monde s’élève à environ 300 000 milliards $. C’est un bassin de richesse dans laquelle nous pouvons puiser pour l’action climatique. Mais si le taux d’intérêt est trop faible, si le risque perçu est trop élevé, nous n’y aurons pas accès. Nous pourrions nous indigner, nous désoler de la réticence des investisseurs à venir en Afrique ou nous pourrions prendre acte, et trouver une solution en leur fournissant une assurance contre ces risques perçus. A Southbridge Fund, nous avons choisi la seconde option.
100 milliards $ consacrés à une sorte d’indemnisation de l’Afrique pour lui permettre d’accélérer son adaptation ce n’est pas beaucoup d’argent lorsqu’on considère les 80 000 milliards $ de PIB mondial annuel.
Lionel Zinsou (Southbridge)
CM : Les institutions de financement se plaignent du peu de projets bancables et bien structurés que proposent les pays africains. Pensez-vous pouvoir surmonter cette difficulté ?
LZ : Quand nous mobiliserons les fonds, nous les déploierons. Nous avons déjà eu écho de doutes à propos de notre capacité à allouer un tel montant sur des projets climatiques en Afrique. Certains pensent qu’il n’y a pas de projets sérieux, que cela va s’éterniser comme sur certaines initiatives passées, etc.
Nous sommes déjà en partenariat avec l’association AFR100 qui regroupe 34 pays porteurs de projets climatiques qu’ils n’arrivent pas à financer. Le seul fonds bleu du bassin du Congo, initié par le président Sassou Nguesso a 260 projets portés par les 6 pays du bassin du Congo qui recherchent du financement. Les 28 autres pays ont également leurs projets qui viendront s’ajouter à ceux-là. Si sur les 34 pays, nous avons en moyenne 2 projets par pays, financés à 50 millions $, nous serons déjà à un besoin de financement de 3,4 milliards $. Même à un projet par pays, nous sommes à 1,7 milliard $ avec le même niveau d’allocation. Nous n’avons donc aucune inquiétude à ce niveau.
CM : Comme vous l’avez dit plus haut, l’Afrique n’a pas de fonds important consacré à son action climatique. De manière générale, elle ne mobilise qu’une infime partie du financement disponible. Qu’est-ce qui justifie selon vous cet état de fait ?
LZ : L’Afrique a le plus de potentiel en termes d’espace, de ressources hydrauliques, de forêts encore épargné. Elle devrait avoir la place de numéro un dans l’attraction de la finance climat, mais est de très loin le continent qui en absorbe le moins.
La difficulté à attirer du financement climatique est dûe aux mêmes raisons qui rendent le métier de banquier d’affaires compliqué en Afrique. Les grandes banques d’affaires de ce monde ne peuvent pas consacrer beaucoup de temps à l’Afrique parce que le coût d’opportunité y est élevé.
La taille des transactions en Afrique est petite par rapport à celle d’une fusion entre multinationales, ou à celle du conseil de gouvernements dont les pays ont un PIB de centaines de milliards de dollars. Si vous occupez une équipe de banquiers sur des transactions 10 fois plus petites, cela leur prend le même temps, et ce n’est pas rentable quand vous pouvez consacrer les mêmes ressources à des transactions plus grandes.
Par ailleurs, l’Afrique représente un marché assez fragmenté de 54 pays ayant des traditions juridiques différentes, des esprits de loi différents, des langues de travail différentes, etc. Une transaction en Afrique prend plus de temps et est plus complexe par rapport au marché européen unifié, au marché de l’Amérique du Nord unifié, au marché chinois ou indien par exemple. Le marché continental grandit, se développe, mais il faudra attendre 10 ans pour qu’on ait un écosystème qui attire du financement.
S’il ne tenait qu’à nous, il n’y aurait pas le début d’un réchauffement climatique.
Lionel Zinsou (Southbridge)
CM : Face aux attentes de l’Afrique en termes d’indemnisation pour la responsabilité des pays riches dans le changement climatique, le monde n’a-t-il pas parfois l’impression que l’Afrique est toujours le continent demandeur ?
LZ : La demande de ces transferts de fonds est tout à fait légitime. L’une des raisons de cette légitimité est que le montant évoqué n’est pas très important. Les gens sont frappés par les milliards évoqués, mais il y a des enjeux de financement sur le climat qui s’élèvent à des milliers de milliards de dollars. Ils sont mis en œuvre et seront de plus en plus nombreux. 100 milliards $ consacrés à une sorte d’indemnisation de l’Afrique pour lui permettre d’accélérer son adaptation ce n’est pas beaucoup d’argent lorsqu’on considère les 80 000 milliards $ de PIB mondial annuel.
La deuxième raison qui justifie ce transfert est que l’Afrique, aujourd’hui, n’est pour absolument rien dans le changement climatique. La moyenne des émissions de gaz à effet de serre en Afrique est de l’ordre de 0,6 tonne par habitant par an. La France, l’un des pays d’Europe les moins carbonés, a 6 tonnes par habitant par an d’émission. Nous sommes 30 fois en dessous des niveaux stratosphériques d’émission de la Chine et des Etats-Unis. S’il ne tenait qu’à nous, il n’y aurait pas le début d’un réchauffement climatique. Dans le même temps, nous sommes un continent objectivement impacté par les changements climatiques provoqués par les autres. Nous avons les sécheresses dans la corne de l’Afrique, des typhons qui ont ravagés du Zimbabwe au Zimbabwe, des érosions côtières dans les pays insulaires, etc. Et à Sharm el Cheick, nous n’avons pas avancé sur ce sujet.
CM : Si les fonds ne sont pas si importants, pourquoi ces financements climatiques promis ne sont-ils pas débloqués ?
LZ : La cause de ce retard de financement est probablement que la prise de conscience par l’opinion publique de ces pays du danger que représente l’inaction climatique est récente. Il faut quand même voir qu’il y avait un président des Etats-Unis qui était climato-septique de façon spectaculaire et qui a fait régresser son pays sur ce plan. Nous n’avons pas non plus une mobilisation chinoise très forte.
Il y a désormais, sur la transition énergétique, un regard africain qui est très différent de celui des pays industrialisés.
Lionel Zinsou (Southbridge)
L’Europe a fait un bond dans la prise de conscience de ces enjeux cette année à cause des inondations catastrophiques en Allemagne et en Belgique, des incendies français et le baisse du niveau des eaux d’étiage dans le Rhin, le Rhône, dans la Garonne. Tout d’un coup, des opinions un peu indifférentes se sont aperçues qu’elles étaient désormais concernées par les effets de ce changement climatique. Cette prise de conscience s’est traduite par une mobilisation pour implanter des centrales peu polluantes et accroître la sobriété énergétique.
Mais aller chez les autres assumer ses responsabilités est encore loin d’être l’idée dominante dans les pays riches. Cette question ne reçoit aucun écho et ne lance aucun débat public. Il n’y a pas de controverses politiques en Allemagne, en France aux Etats-Unis parce que peu de personnes ont conscience de leur responsabilité et de la nécessité d’investir en Afrique, un continent qui comporte des solutions à de nombreux problèmes climatiques. Les gens n’ont absolument pas cette conscience donc ils ne s’exécutent pas sur leurs engagements.
Ce qui s’est passé à Sharm El Cheick est que nous sommes arrivés à un tournant où l’Afrique décide de prendre l’initiative et de s’organiser elle-même. Nous avons eu des initiatives d’Africains engagés à s’occuper de ce problème parce qu’il y va de notre développement.
CM : A cause de ces promesses non-tenues notamment, et d’autres facteurs, des voix s’élèvent, de plus en plus, en Afrique notamment, pour remettre en question la pertinence des COP. Que répondez-vous aux personnes qui estiment que les COP sont inutiles ?
LZ : Il faut faire très attention parce que d’immenses progrès sont faits à la COP. D’abord si vous ne réunissez pas toutes les parties, (ce n’est pas qu’une conférence des Etats), les ONG, les activistes, les scientifiques seraient inaudibles. Si vous enlevez la COP, les rapports du GIEC seraient des non-événements, des rapports isolés.
Nous serions encore plus affectés par le changement climatique s’il n’y avait pas ces grands moments mondiaux de prise de conscience, d’émission des bonnes informations et de plaidoyers. C’est lors de l’une de ces COP, en 2015, à Paris, que l’Afrique a commencé à se faire entendre, notamment grâce au président Alpha Condé. Elle a été réécoutée parce qu’elle a accueilli la COP 22 à Marrakech. Donc perdre tout ça sous prétexte que ce n’est pas assez efficace, serait du gâchis.
Si les 1,2 milliards d’Africains osaient se comporter, en termes d’émission, comme les 1,4 milliards de Chinois, les 500 millions d’Européens ou les 400 millions d’Américains, nous ne serions pas à 2° C de hausse de température, la terre serait totalement invivable.
Lionel Zinsou (Southbridge)
La deuxième chose qui plaide en faveur des COP, est qu’il y a quand même des engagements qui y sont pris. Aujourd’hui vous avez des tribunaux, en France au Pays-Bas notamment qui mettent les gouvernements en accusation parce qu’ils ne font pas assez d’efforts en matière de transition énergétique. Ces tribunaux condamnent les pays et les obligent à tenir les engagements pris dans le cadre de l’accord de Paris. Sans ces engagements pris aux COP, le droit international leur serait inopposable et ils n’auraient pas d’obligations.
Alors, oui, nous avons absolument besoin des COP, sauf si vous voulez piétiner le droit, la science, la société civile, les ONG en disant ; « Tout ça, ce sont des verbiages… ». Ce n’est pas parce que quelque chose n’est pas efficace à 100 %, mais à 50 % qu’il faut prendre la position absurde de la supprimer. C’est un raisonnement heureusement extrêmement rare, mais c’est un raisonnement simpliste.
CM : Un autre point d’achoppement dans les COP depuis les dernières années est la transition énergétique de l’Afrique et le droit du continent à utiliser ses ressources énergétiques, le pétrole et le gaz notamment. Quel est votre avis sur la question ?
LZ : Cette question est extrêmement importante et porte une controverse majeure. Il y a désormais, sur la transition énergétique, un regard africain qui est très différent de celui des pays industrialisés. Macky Sall, le président de l’Union africaine, s’est fait le porte-voix de ses pairs sur les tribunes internationales, en affirmant que nous ne renoncerions pas à nos ressources énergétiques.
Plus que tous les autres continents, l’Afrique a droit au développement et à la justice. Et cela passe par l’accès à l’électricité. Dans les années 60, 90 % des Africains n’avaient pas accès à l’électricité, ce qui représentait 270 millions d’individus. Même si aujourd’hui, le taux est passé à 50 % de personnes non-électrifiées, près de 600 millions de personnes demeurent dans le noir. Ces millions de personnes s’arrêtent de vire au coucher du soleil, accouchent avec des lampes torches, perdent leurs récoltes parce qu’ils n’ont pas silos et de chambres froides pour les conserver. Il est hors de question que nous allions leur expliquer qu’elles resteront sans électricité parce que cela ne plaît pas à une ONG ou à un gouvernement d’un pays développé.
Dans 20 ans, l’Afrique aura plus de 2 milliards d’habitants et quadruplera son niveau de revenu par habitant. Pour y parvenir, nous avons besoin d’énergie. C’est également une question de justice climatique.
En 2022, les pays industrialisés ont encore augmenté leurs émissions en ayant recours aux énergies fossiles, le charbon notamment. Et cette hausse était de l’ordre des émissions annuelles de gaz à effet de serre du continent africain. Elle s’est ajoutée au niveau antérieur des émissions enregistrées en 2021. Ils ne peuvent pas faire cela et venir en Afrique nous dire d’arrêter l’utiliser notre gaz ou notre pétrole.
Pour des raisons politiques, morales, sanitaires, etc., nous électrifierons l’Afrique à 100 % et notre ambition est d’y parvenir dans 10 ans. Ceci est non négociable, c’est un discours qui s’amplifie et rien ne l’arrêtera.
CM : Ne risque-t-on pas de répliquer les mêmes erreurs que les pays développés en termes de modèle de développement ?
LZ : Dans l’exploitation de nos ressources, nous utiliserons une approche différente des pays industrialisés, parce que nous avons conscience des enjeux climatiques. Si les 1,2 milliards d’Africains osaient se comporter, en termes d’émission, comme les 1,4 milliards de Chinois, les 500 millions d’Européens ou les 400 millions d’Américains, nous ne serions pas à 2° C de hausse de température, la terre serait totalement invivable. Mais nous ne ferons pas ainsi, parce que nous avons appris des erreurs des autres.
Nous nous servirons du pétrole et du gaz uniquement pendant une transition, la plus courte possible et nous développerons de l’énergie renouvelable, évidemment. Nous avons, en effet, l’espace nécessaire à ce type de technologie, mais également d’abondantes ressources d’énergie renouvelable. Nous exploitons actuellement 3 % de nos ressources hydroélectriques, ce taux pourrait être porté à 50 %. Nous utiliserons l’ensemble des ressources propres, le solaire, l’éolien, la géothermie et le nucléaire. Nous sommes également très bien placés pour la production de l’hydrogène verte.
Nous utiliserons toutes ces technologies parce que nous sommes conscients que nous sommes les seuls à avoir les moyens de protéger la forêt équatoriale. Nous pouvons également replanter nos forêts, en Afrique de l’Ouest par exemple parce que nous avons l’espace nécessaire.
CM : La réponse au changement climatique est également porteuse d’opportunités pour le continent. Quelles mesures pourrions-nous prendre pour les saisir ?
LZ : Aller le plus vite possible. Utiliser très vite les expériences des autres pays qui ont accumulé les bonnes pratiques ou détiennent les meilleurs experts dans un domaine donné. Les Ghanéens, les Sud-Africains et les Kényans par exemple savent comment déployer des unités importantes d’énergie renouvelables. Les Marocains sont très avancés sur les technologies solaires. Le Kenya a une bonne maîtrise de la géothermie. Le Gabon est en avance pour la gestion durable de ses forêts. L’Afrique de l’Est est en avance sur les mini-réseaux.
Il faut aller vite et répéter à toute vitesse toutes les expériences pertinentes pour nous et le faire avec des entreprises africaines. Pour saisir les opportunités liées au changement climatique, les pays africains devront partager ces expériences le plus vite possible. Nous savons absolument tout faire, mais quelque part dans un coin du continent. Il nous faut donc mutualiser.
Gwladys Johnson Akinocho
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